Banderole « anti-ch'tis » : normalisation et diversion
La banderole « anti-ch'tis » exhibée par des supporters du PSG lors du match PSG-Lens le 29 mars semble être devenue une affaire d'Etat: recherche d'ADN, promesses de dissolution des clubs de supporters concernés et « d'éradication de ces gens-là des clubs », jusqu'au Président de la République qui reçoit solennellement le maire de Lens et le président du club...
Tout cela pour une banderole - imbécile, certes - dévoilée entre 22h18 et 22h21... Qui n'avait d'ailleurs rien d'extraordinaire: la compétition est intense sur ce terrain entre supporters, à celui qui trouvera l'injure la plus frappante, la provocation la plus belle... Pourquoi tant d'émotion, alors? En fait, ces réactions sont révélatrices d'une triple évolution, du foot-ball, de la société et de la politique.
Normalisation du football, d'abord. Les clubs de supporters sont les dernières traces d'un foot populaire, où à travers le club le populo trouve à la fois une distraction, une cause de fierté dans un quotidien qui en manque quelque peu et aussi, c'est vrai, le moyen, d'évacuer quelques frustrations, dont l'expression est interdite ailleurs. Or ce foot populaire ne convient pas à ces instances dirigeantes, qui rêvent d'un spectacle aseptisé augmentant l'audience. En plus, ces salauds de pauvres n'ont pas assez d'argent! Leur rêve (à peine secret), c'est l'Angleterre, où le problème du hooliganisme a été réglé moins par des mesures préventives que par l'augmentation du prix de billet; permettant à Manchester d'être si rentable.
Normalisation de la société, dans laquelle toute violence, surtout symbolique, est devenue de plus en plus inacceptable. Il ne saurait guère être question de racisme entre Parisiens et Lensois, mais peu importe: incitation à la haine. Surtout, ne pas risquer de blesser quiconque, d'écorcher quelque moi un peu douillet...
Diversion politique, enfin. Tant que l'on se focalise sur cette banderole, on ne parle pas de pouvoir d'achat, de sécurité, etc. Les Boulogne Boys seront dissous: dormez tranquilles, braves gens!